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  • Photo du rédacteurPirBip

Témoignage d'une ancienne proclamatrice des Témoins de Jéhovah - Mon départ et l'après

Fil de suivi :

  1. Introduction

  2. Une enfance chez les Témoins

  3. Hiérarchie et Dogmes

  4. Mes raisons personnelles du départ, l'après

  5. Conclusion


Il fallait partir


Comme beaucoup d'enfants de mon âge, mon plaisir n'était pas de me faire plaisir, mais de faire plaisir à mes parents. J'ai donc très vite assimilé les leçons des Témoins de Jéhovah, et j'ai fini à l'âge de 10 ans à prendre position pour le service chrétien, et à passer le premier palier, à savoir devenir proclamateur.


Mais peu de temps après cet achievement, à 11 ans, j'ai pris conscience que je n'aimais pas être un garçon. Mon plaisir résidait dans le fait d'être une fille. J'ai commencé à vraiment prendre plaisir à ne plus être dans des vêtements qui au final me correspondaient mieux. Mais le problème, c'est que le dévoiler me faisait très peur. J'avais surtout peur de ne pas être reconnue à ma juste valeur alors que les questions de genre avaient à peine été évoquées et que même l'homosexualité, alors à peine rentrée dans les moeurs, faisaient l'objet de luttes intestines de la part des politiques au sujet du PACS. Oui, avant l'ouverture du mariage civil aux homosexuels, il y a eu cette étape. J'ai donc enfermé cette spécificité au fond de moi.


Ancien à l'époque, mais devant gérer à la fois ses trois enfants, une mère malade, et au final sa propre charge de travail, mon père a abandonné ses privilèges et est redevenu simple proclamateur. Une décision sage quand on sait qu'il a du par la suite faire face à des soucis de santé s'accumulant. Cela lui a permis de consacrer plus de temps à mon éducation.


À l'age de 13 ans, j'ai effectué une tentative de départ du mouvement. J'en avais clairement marre de me faire laver le cerveau. Mais au final, mon père m'a remise dans "le droit chemin". J'ai donc renfermé et ingéré aussi cette envie de départ. J'ai donc du chercher des stratégies de départ, et attendre l'ouverture de brèches, pour pouvoir me détacher de la religion. Ces brèches, elles sont arrivées du côté de la famille de mon père. Alors que l'un de mes cousins avait une vie de TJ rangée et qu'il était marié à une TJ, une de mes cousines éprise de lui a réussi à faire capoter le mariage, et à entraîné d'abord une séparation d'entre mon cousin et sa femme, avant que ceci ne devienne un adultère et n'entraîne une excommunication des deux. Premier choc majeur.


Une de mes autres cousines, toujours du côté de mon père, avait trouvé un amant, et au final a fini par se marier avec, entraînant son départ du mouvement. Deuxième choc majeur.


Un cousin à moi, qui pourtant avait une copine à l'époque, s'est rendu compte de son homosexualité. Il a quitté le mouvement peu de temps avant de rejoindre son amant. Troisième choc majeur.


Toutes ces brèches m'ont encouragée à penser que, Témoin ou pas, de toute façon, peu importe ! À partir de cet instant, j'ai pu réfléchir plus longuement à comment je pouvais me débarrasser du culte plutôt qu'à comment je pouvais rester. Pour ça, je devais être sûre de mes convictions, et démonter le plus possible les arguments qui m'étaient opposés. C'est là qu'Internet m'a aidée. J'ai pu glaner des nombreuses informations sur la (non-)véracité des interprétations, et dénoncer l'ostracisation dont faisaient part les membres des Témoins de Jéhovah et qui pousse ces derniers à la fois à ne pas s'ouvrir au monde mais à le fréquenter, et ai pu les exposer dans une lettre de démission, que j'ai délivré par voie postale, sans en informer mes parents.. en Mars 2014, donc à l'âge de 23 ans.


Pourquoi si tard ? Eh bien, surtout par lâcheté, mais surtout par prévention. J'avais désormais un emploi en CDI capable de me sustenter, donc je n'avais plus besoin de vivre chez mes parents en cas de poussée vers la sortie, et j'avais l'assurance de trouver rapidement un appartement pour emménager temporairement. La crainte d'être mise dehors, surtout due aux témoignages nombreux de gens qui s'étaient retrouvés isolés à partir du moment où ils avaient quitté le mouvement. Une pression morale qui ne m'atteignait plus à partir de ce moment-là. Sécuriser mon départ était une priorité dépassée.


L'après


Peu de temps après avoir abandonné les Témoins de Jéhovah, surtout, j'ai enfin pu laisser éclater au grand jour mes troubles intérieurs. Le fait d'être dans le mauvais corps depuis tant d'années a enfin pu s'exprimer. J'ai donc enfin, après 12 ans de reniement, laisser s'exprimer ce sentiment. Mais, chose rare pour le souligner, mes parents m'ont gardée à la maison malgré leur religion. Je ne sais pas pour quelle raison, mais les conditions d'apprentissage des dogmes chez mes parents (voir Une Enfance chez les Témoins) les ont sûrement poussé à éviter de me pousser à la sortie.


Il m'a fallu du temps pour me reconstruire. Tout ce que j'avais ingéré, notamment considérer l'homosexualité comme une déviance, la sexualité hors mariage interdite, les prières, et tous les réflexes pavloviens de réaction (le fait de dire "on,nous" quand il fallait évoquer "les Témoins") ont été longs à éliminer. Cela dit, sûrement moins longs que d'autres. En effet, je cherchais plus souvent à éviter d'évoquer le fait d'être dans ce mouvement car j'avais honte d'en être.


Le sentiment d'isolation que j'aurais pu ressentir du fait de ne plus fréquenter les Témoins de Jéhovah a été extrêmement modéré. En effet, je n'avais personne à qui je tenais particulièrement dans le mouvement, sinon ma propre fratrie, dû au fait que personne n'était de mon âge, donc je ne trouvais pas d'accroche spécifique. Mon petit frère, peu de temps après mon départ du mouvement, m'a suivie, notamment en se rendant compte que, selon ses propres dires, le fait d'être avec des Témoins de son âge m'isolait de lui alors que j'avais souvent été là pour lui. Mais aussi et surtout parce qu'il avait trouvé une copine hors du mouvement.


Mais quand on quitte un mouvement avec l'espoir d'un paradis post-apocalyptique, même en n'y ayant jamais vraiment cru, il est difficile de trouver un sens à sa vie. J'ai donc du apprendre à ... découvrir qu'il n'y en avait pas, et à m'en contenter. Tant pis !


Cependant à force de temps et de découverte de chaînes de vulgarisation scientifique, puis de chaînes zététiques, pour finir sur des chaînes de sociologie, j'ai pu réussir à finir de déconstruire mon passé et voir émerger un objectif : comprendre le monde qui m'entoure pour ne pas laisser les gens dans l'ignorance.


Ce témoignage me permet de mettre par écrit ce que je pense être le plus important : se rappeler de mon passé pour que celui-ci serve à la construction d'un meilleur avenir, d'une manière ou d'une autre. Je ne prétends pas révolutionner le monde avec, mais grâce à cette explication complète, donner un aperçu de ce que j'ai traversé, pour donner de l'inspiration aux suivants.


IL EST DONC GRAND TEMPS DE CONCLURE !

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